Dans un jugement du 12 février 2015, le Tribunal de Grande Instance de Paris a annulé la marque de la société ETAM[1] sur plusieurs fondements.
La société ETAM reprochait à la société EMPREINTE, spécialisée dans la création d’articles de lingerie et de maillots de bain haut-de-gamme, de faire usage d’un E stylisé, qu’elle considérait comme identique ou similaire à son propre E.
Les marques en litige étaient les suivantes :
Pour sa défense, la société EMPREINTE affirmait que le E de la société ETAM n’était pas utilisé tel qu’il était déposé, mais seulement en association avec le nom ETAM lui-même.
Le Tribunal rappelle les principes dégagés par la CJUE dans les arrêts Nestlé[2] et Levi Strauss[3], à savoir que « le maintien des droits du titulaire d’une marque enregistrée peut, comme l’acquisition du caractère distinctif par l’usage, résulter aussi bien de l’usage sérieux, en tant que partie d’une marque enregistrée, d’un élément de celle-ci, que de l’usage d’une marque distincte en combinaison avec une marque enregistrée ».
Mais il poursuit en affirmant « encore faut-il que cet usage combiné permette au public pertinent de percevoir effectivement le produit désigné par la seule marque dont la protection est demandée comme provenant d’une entreprise déterminée. »
Il juge ainsi que « la prépondérance visuelle écrasante accordée au signe « ETAM » exclut que le signe « E », qui est d’ailleurs présenté sous une forme distincte de celle sous laquelle il a été enregistrée puisqu’il est en sa partie basse masqué par le signe « ETAM », soit perçu seul comme rattachant les produits de la classe 25 à la SAS ETAM. »
La déchéance de la marque E a en conséquence été prononcée pour tous les produits de la classe 25 à compter du 10 novembre 2010.
Autre enseignement important dans cette affaire sur la preuve de l’usage sérieux d’une marque dans le cadre d’une demande en déchéance pour défaut d’usage pendant cinq ans : l’emploi d’un « favicon »[4], n’est pas un usage à titre de marque. Selon les juges « il est utilisé pour identifier non des produits mais un espace virtuel de vente. Il s’agit d’un usage à titre d’enseigne de la boutique en ligne ETAM ».
Le deuxième motif d’annulation de la marque E d’ETAM repose sur l’article L.711-2 du Code de la Propriété Intellectuelle, et sur la jurisprudence de la CJUE aux termes de laquelle, les marques doivent être intrinsèquement aptes à identifier le produit comme provenant d’une entreprise déterminée et propres à les distinguer des produits d’autres entreprises[5].
Me Charlotte Galichet
Avocat à la Cour