Poursuivi devant les juridictions répressives par des sociétés de gestion collective, des majors et des représentants d’ayants-droits, le créateur du forum Wawa Mania a été reconnu coupable de contrefaçon par jugement du 2 avril 2015. Ayant demandé un renvoi pour qu’il soit statué sur les dommages et intérêts dus aux parties civiles, il a, par la suite, été condamné par le Tribunal correctionnel de Paris à une indemnité de plus de 15 millions d’euros.
Outre le montant (pharaonique) des dommages et intérêts prononcé par le Tribunal, c’est la méthode de calcul adoptée qui retient l’attention.
Wawa Mania est un forum de discussion, accessible après inscription gratuite, dont une partie est consacrée à la mise à disposition de liens dirigeant vers des sites de stockage et de téléchargements gratuits et hébergeant des vidéos, de la musique et des logiciels (Windows Vista, Works9 et Office) en l’absence de toute autorisation.
Il était reproché à Monsieur D.M. d’avoir, par les sites wawamania.eu et wawa-mania.ws, dont il est le créateur et l’administrateur, reproduit, diffusé, mis à disposition du public et communiqué, des œuvres de l’esprit, musiques, vidéogrammes, phonogrammes et logiciels contrefaits.
Le Code de la propriété intellectuelle définit la contrefaçon comme « toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une œuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur » (L.335-3 du Code de la propriété intellectuelle).
Pour le Tribunal, les liens permettant le téléchargement direct des œuvres frauduleuses, Monsieur D.M est coupable de contrefaçon par diffusion et mise à disposition.
En conséquence, Monsieur D.M. est condamné à un an de prison ferme et 20 000 € d’amende. Notons que le Tribunal mentionne qu’il est possible de considérer que ces actes peuvent participer à la diffusion de la culture pour tous.
L’évaluation du préjudice: les termes du calcul
Pour le Tribunal, la difficulté d’évaluer l’intégralité du préjudice, et de ne pas pouvoir démontrer exactement le nombre de téléchargements réalisés, ne doit pas empêcher l’indemnisation des ayants-droits, dans la mesure où le site a permis que soit potentiellement commis un nombre considérable de téléchargements illégaux.
Le premier élément retenu est le nombre de « vues ». Le Tribunal reconnait que cette notion de vue ne correspond pas, sur le plan technique, aux actes de téléchargement mais estime qu’il peut être retenu dans la mesure où les membres du site recherchent des fichiers à télécharger.
De ce fait, le Tribunal va réduire de 50% le nombre de vues constatées pour déterminer le nombre de téléchargements illégaux, s’appropriant par la même le mode d’évaluation retenu par certaines des parties civiles.
Le second élément est le prix applicable aux œuvres. Le Tribunal va distinguer selon les parties civiles et les œuvres concernées :
En conséquence, le montant des dommages et intérêts respectivement alloué est de :
En sus des dommages et intérêts alloués au titre du préjudice patrimonial, certaines parties civiles ont également obtenu des sommes en réparation de leur préjudice moral allant de 1 € (pour Microsoft) à 20 000 € (pour la SCPP, la SEVN et la FNDF).
Aujourd’hui le site est toujours en activité. Le nom de domaine est en Equateur et ses serveurs sont situés hors de France. La lutte contre le piratage continue !